La taxonomie des objectifs pédagogiques de Bloom
Dans un ouvrage qui fait référence, Bloom (Bloom, B. S.; Engelhart, M. D.; Furst, E. J.; Hill, W. H.; Krathwohl, D. R. (1956). Taxonomy of Educational Objectives: The Classification of Educational Goals. Handbook I: Cognitive Domain. New York: David McKay Company) explique les différentes façons de savoir quelque chose.
Il souligne que cette connaissance requiert différents niveaux d'abstraction mentale.
Lorsque nous abordons un sujet nouveau, notre processus cognitif comporte les phases suivantes :
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Recevoir la connaissance (niveau le plus bas),
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Lui donner du sens (compréhension),
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L'utiliser (application),
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Construire une représentation mentale du contexte.
Bloom insiste sur la phase de synthèse qui "consiste à disposer et à combiner les fragments, parties, éléments, etc., de façon à former un plan, ou structure, que l’on ne distinguait pas clairement auparavant”.
Ainsi, en structurant les questions en fonction de ces différentes étapes (connaissance, compréhension, utilisation...), les enseignants ou formateurs peuvent plus facilement déterminer où se situent les faiblesses de leurs élèves.
Dans la construction d'une évaluation, il faut diversifier les types de questions en sollicitant les différentes tâches mentales (analyse, synthèse, déduction, évaluation) qui permettent de construire une connaissance solide.
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Le modèle behavioriste
Le modèle behavioriste s'appuie sur un modèle d'apprentissage "stimulation-réponse" et produit les bases d'un enseignement programmé.
Il est issu de la rencontre des travaux sur le comportement ("behavior") de Pavlov en psychologie animale (1890) et de ceux de Skinner en psychologie expérimentale (1978). Le psychologue Skinner est considéré comme le père de l'enseignement programmé (ancêtre de l'enseignement assisté par ordinateur). Il propose une conception linéaire de l'enseignement programmé qui a été ensuite ramifiée par Crowder.
L'approche linéaire de Skinner s'appuie sur un découpage de l'enseignement en objectifs progressifs à atteindre. Un apprentissage suit le schéma : stimulus, réponse, récompense si succès, renforcement. L'erreur est sans appel et très pénalisante voire traumatisante.
L'approche ramifiée de Crowder repose sur un apprentissage construit en arborescence. Selon qu'il répond a, b ou c à une question, l'élève poursuivra par une activité différente. L'erreur est possible et même valorisée car elle permet de détecter une lacune.
Une aide est proposée en fonction de la réponse choisie. Notons que Skinner construisait des questions à choix multiples, mais craignait que l'élève, en faisant une erreur, ne crée une association question-réponse incorrecte. Il préférait donc que l'élève écrive sa réponse et la compare à la réponse correcte.
C'est la naissance de la pédagogie par objectifs. L'erreur est considérée comme une lacune demandant du renforcement. La limite de ce modèle est qu’il ne présente pas de volet acquisition de connaissances.
3 principes, issus de cet enseignement partagé, sont applicables à l'évaluation en entreprise :
● La décomposition des compétences complexes en petits objectifs,
● La remédiation en cas d'erreur,
● L’évaluation fréquente des petits objectifs car, pour provoquer un apprentissage, l’entraînement régulier renforce les connaissances.
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Le modèle constructiviste
Contrairement au modèle behavioriste, le modèle constructiviste (Piaget, La naissance de l'intelligence chez l'enfant, Paris, Delachaux et Niestlé, 1936 ; La construction du réel chez l'enfant, Paris, Delachaux et Niestlé, 1937) considère positivement l'erreur.
Il est issu des travaux de Piaget, qui pense que la connaissance se construit. L'image des plaques tectoniques qui bougent sur la surface de la Terre est une métaphore utilisée pour illustrer l'approche de Piaget. L'apprentissage doit se mettre en place dans un environnement actif, où les activités conduisent à la réflexion et bousculent les représentations mentales.
La connaissance se construit et l'apprentissage demande une activité de l'apprenant. Le rôle de l'enseignant est de créer des situations pédagogiques où l'élève est actif et se pose des questions. Quel que soit le cadre mis en place par l'enseignant (étude de cas, résolution de problèmes en groupe, jeu de questionnements entre l'élève et l'enseignant...), l'élève construit son savoir dans l'activité.
L'exercice qui consiste à créer des questions sur un sujet est très formateur et constitue un excellent moyen d'apprendre et de se préparer à une évaluation.
Le modèle socioconstructiviste de Vygotsky
À la même époque que Piaget, mais sans le savoir dans un premier temps, un psychologue russe, Vygotsky, va s’intéresser aux interactions sociales des processus cognitifs permettant l’apprentissage.
Son modèle repose également sur le fait que l'apprentissage passe par l'action mais Vygotsky ajoute une dimension nouvelle, en affirmant que l'on apprend mieux au contact des autres, que l'apprentissage doit être collaboratif.
Ce mode d'apprentissage à plusieurs présente l'avantage de conduire l'élève à expliquer ses stratégies ce qui ancrera plus encore sa connaissance. La connaissance se construit encore mieux en partageant et en échangeant sur ses stratégies.
En entreprise, où la rencontre n'est pas toujours facile à organiser, la contribution à une base de questions est une bonne option pour communiquer, partager sa connaissance et apprendre à partir des autres.
CONTRIBUER : mettre sa connaissance en relation avec celle des autres.
Cognitivisme et travaux en neuro-éducation
Avec l’émergence de l’informatique s’est développé le cognitivisme qui établit un parallèle entre le couple esprit/cerveau et le couple matériel/logiciel. La mémoire traite et recueille les nouvelles informations et ensuite les restitue selon différentes stratégies.
Beaucoup plus récemment, les recherches en neuro-éducation ont donné quelques pistes faciles à mettre en œuvre pour améliorer l'apprentissage. Parmi ces conseils, on retiendra qu'il faut :
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Structurer la connaissance, car la mémoire à court terme (MCT) ne peut retenir, en moyenne, que 7 items,
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Répéter pour ancrer dans la mémoire. Un rappel 24 heures après l'apprentissage initial permet d'intégrer la connaissance pour une semaine. Si le rappel a lieu une semaine plus tard, la connaissance reste pendant un mois. Enfin, un rappel un mois plus tard durera 6 mois,
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Ajouter du concret sur de l’abstrait permet de faire plus facilement le lien entre la théorie et la pratique. Par exemple, "Voici ton goûter, donnes-en la moitié à ton frère" sera plus efficace que la phrase "Quand on divise par deux, on obtient la moitié",
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Varier les approches et les supports. Il existe différentes habitudes d'apprentissage en fonction des cultures et des pays. Varier les techniques et les représentations permet de s'adapter et d'aborder les différentes facettes d'une compétence,
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Rassurer : les 3 couches du cerveau (reptilien, mammalien et cortex) fonctionnent avec des priorités décroissantes. Difficile d’apprendre si la faim ou la peur nous tenaillent, le cortex est débranché. Il est donc impératif d'instaurer un climat de confiance pour que chacun donne le meilleur de lui-même,
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Découper le temps : Il est préférable de faire 15 minutes de test et de passer à autre chose. Il est également profitable de faire une synthèse de la séance en fin de test.
Quelques principes à appliquer pour construire une évaluation :
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Structurer la connaissance,
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Construire des questions similaires pour permettre de répéter,
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Apporter des exemples concrets,
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Varier les supports,
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Faire des tests de courte durée,
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Présenter une synthèse en fin de test,
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Laisser un temps confortable pour répondre afin d'éviter le stress.
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